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Les 5 questions posées à Wafa GHORBEL, auteure franco-tunisienne.

«Composer des textes ou des mélodies rend l’existence plus tolérable à mes yeux…»


Bonjour, Wafa GHORBEL. C’est un plaisir pour nous de vous adresser nos cinq questions.

Vous avez des vies académique, littéraire et culturelle très riches. Et si on vous demandait de vous présenter en peu de mots ?

Je suis universitaire, docteure en Littérature et Civilisation Françaises. J’ai soutenu une thèse de doctorat sur la question du Mal dans l’œuvre romanesque de Georges Bataille. J’ai d’ailleurs consacré une vingtaine d’articles à ce même penseur ainsi qu’à l’écrivaine Marguerite Duras, essentiellement. Je suis, par ailleurs, romancière. J’ai publié deux romans (un diptyque) : Le Jasmin noir et sa suite indépendante, Le Tango de la déesse des dunes. J’ai autotraduit le premier en arabe littéraire.

Je suis de même auteure-compositrice-interprète. Je conçois des spectacles. J’ai traduit de nombreux standards du jazz, chansons françaises et titres universels en dialecte tunisien et en arabe littéraire. Je suis en train de mettre en place un projet autour des œuvres de poètes arabes contemporains.

Composer des textes ou des mélodies rend l’existence plus tolérable à mes yeux…


Vous êtes l’auteure de trois livres dont Le Jasmin noir paru en 2016 chez La Maison Tunisienne du Livre. On parle très souvent de bon.ne.s auteur.e.s. Pour vous qui avez à votre actif cinq prix littéraires, qu’est-ce que signifie «être un.e bon.ne auteur.e» ?

Être un bon auteur, c’est être d’abord un bon lecteur, un grand lecteur, un lecteur passionné et un fin observateur du monde. S’imprégner aussi bien de ces lectures que de ce monde et finir par tisser ses propres histoires, par les construire de bout en bout, par les ficeler en fonction de sa culture et de son imaginaire, prendre plaisir à le faire et à transmettre ce plaisir au lecteur. Être bon écrivain ne consiste pas uniquement à savoir raconter des histoires, à maintenir le lecteur en haleine… Le coiffeur et l’épicier du coin en sont capables.

L’histoire racontée est évidemment importante, mais c’est la façon de le faire qui importe le plus, à mon sens… La subtilité de la langue, les tournures des phrases, la musicalité des mots, la composition de l’ensemble. « De la musique avant toute chose », disait Verlaine. Un bon roman est une peinture musicale de l’imaginaire de l’écrivain qui trouverait son écho dans celui de son lecteur ; une orchestration des mots, des sons, des images ; une musicalisation et une narrativisation synchrones de l’univers.


En plus de vos cinq prix littéraires en Tunisie, vous avez été, à plusieurs reprises, membre de jurys pour des prix littéraires nationaux et internationaux. Que pensez-vous du fait de ne jamais ou presque jamais présenter leurs faiblesses aux candidat.e.s recalé.e.s lors des concours littéraires ? Leur montrer où iels ont  »pêché » ne peut-il pas contribuer à améliorer leurs potentiels ?

Je ne pense pas que les « candidats recalés » ou que les écrivains qui n’ont jamais décroché de prix littéraire soient faibles ou qu’ils aient des leçons à prendre des jurés. Ils ne correspondent simplement pas aux goûts littéraires de ceux-ci ou aux critères d’évaluation du prix littéraire en question. Certains grands écrivains n’ont jamais vu leurs œuvres primées. Le seul baromètre de la réussite d’un romancier, à mon sens, est le retour des lecteurs, les échos de lecture.


Comment définissez-vous en cinq mots la littérature en Tunisie ?

La littérature tunisienne est d’abord hétérogène : elle est essentiellement arabe et secondement francophone. Elle traite de sujets très divers. Une partie des écrivains se préoccupe du contexte tunisien (actuel ou passé). Toutefois, la nouvelle génération s’en détache souvent. Nous remarquons l’émergence des littératures de genre (science-fiction, fantasy, roman policier, thriller psychologique…) et j’y vois une rébellion contre une réalité qui ne correspond pas aux attentes de ces écrivains.

La littérature tunisienne est moderne. C’est une littérature du contemporain qui ne verse généralement pas dans la nostalgie des temps passés, sauf exceptions.

La littérature tunisienne se réinvente et se renouvelle. Elle refuse les ismes, les discours identitaires rigides, les clichés, les préjugés.
C’est une littérature qui s’intéresse au monde, qui cherche à s’ouvrir, à percer, à se faire connaître, à dépasser les frontières.

Une littérature résistante qui survit aux difficultés éditoriales et lectorales ainsi qu’aux différentes révolutions (numérique, politique, sociale…), voire, qui s’en nourrit.

Que pensez-vous de la femme africaine dans la littérature contemporaine.

La femme africaine occupe une place centrale dans la littérature contemporaine. Elle s’éloigne souvent des clichés de sa représentation. Elle est moins effacée, plus affirmée. Elle se rebelle, s’émancipe des traditions et se renouvelle sans cesse. Il s’agit d’une femme à identité-multiple : on ne peut pas vraiment parler d’une femme africaine, ni d’une femme maghrébine, ni d’une femme subsaharienne. Il y a autant de femmes que de pays, et même au sein du même pays, on ne peut pas vraiment cantonner la femme dans un prototype prédéfini. La littérature africaine contemporaine représente un féminin aux mille et une couleurs et saveurs.


Linelitt’

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Publié par linelitt

Amoureuse des livres et du cinéma

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